Vers l’Alter-Sommet

La réunion préparatoire a été organisée par la FGTB CG et présidée par Andrea Della Vecchia (FGTB), Felipe Van Keirsbilck (CSC), Frédérique Payen (MMF), Solange Cidreira (Féministes pour une autre Europe) et Walter Baier (transform! europe).

Au cours des débats, les représentants des groupes de la coordination nationale ont informé les personnes présentes de l’état de la mobilisation. Par ailleurs, il a été débattu du contenu d’un « Mémorandum des peuples d’Europe » ; celui-ci doit être soumis à l’Alter-Sommet. La proposition concernant la forme de l’initiative à Athènes doit être discutée lors de la prochaine réunion du comité de coordination de l’Alter-Sommet, à Athènes le 8 février.

L’ambition de l’Alter-sommet

(19 Décembre 2012)

La proposition de tenir un sommet des mouvements sociaux et politiques alternatifs à Athènes du 7 au 9 juin 2013, traduit la volonté de créer un front social européen et politique pour lutter contre l’austérité et le tournant autoritaire de l’intégration européenne. Cela a été rendu possible par des luttes sociales importantes et significatives en Europe du Sud et des victoires électorales de certaines formations de la gauche politique dans différents pays.

Le mouvement politique préparatoire à cet Alter-Sommet (AS) remonte au Forum social européen – cadre dans lequel la Conférence sociale conjointe (JSC) a été créée à Malmö, à l’automne 2008. Son but était de promouvoir un débat plus structuré et élaboré, par rapport au Forum social, une stratégie commune entre les mouvements sociaux, les ONG et les syndicats. En 2012, le réseau transform! a été admis dans le comité d’initiative de la JSC.

Les textes de positionnement produits par le JSC lors de ses deux conférences, notamment en matière d’austérité, d’égalité fiscale, de politique monétaire et budgétaire, ainsi que de commerce extérieur, peuvent être téléchargés sur le site Web www.jointsocialconference.eu.

Ils méritent d’être lus car ils montrent que cette tentative d’unir les acteurs sociaux d’une nouvelle manière est également un projet intellectuellement ambitieux qui a permis à transform – qui ne prétend pas être un acteur politique – de participer en termes de contenu.

Dans le cadre du comité d’initiative de la JSC, soutenu par la CES, collaborent la plupart des centrales syndicales – principalement orientées à gauche – la CGT, FSU, Solidaire, CGILL, CCOO, CGT-P, FTGB, le SCC et MSZOSZ – ainsi que d’importants mouvements sociaux européens, de la société civile et écologiques – ATTAC, EAPN, le CADTM et Greenpeace.

Le déclenchement de la crise financière en Europe, la brutalité des programmes d’austérité, la sévère crise sociale dans l’Est – ainsi que la détermination avec laquelle les élites néo-libérales s’empressent de profiter de la crise pour détruire l’État-providence et un tournant autoritaire de l’intégration européenne – ont radicalisé et politisé le débat. Ainsi, pour la première fois, même la CES (Confédération Européenne des Syndicats) a, en février 2012, rejeté un traité européen – le pacte fiscal – sur la base de ses impacts sociaux régressifs. Ces évolutions ont également révélé les limites des processus du Forum Social.

Dans ce nouveau contexte politique, le projet d’Alter-sommet a été soumis en mars 2012, dans le cadre de la réunion annuelle de la Conférence sociale conjointe. Il a été bien accueilli par tous les acteurs présents, des représentants des syndicats, des mouvements sociaux, de la société civile et des écologistes, ainsi que des ONG. Le porte parole du seul parti politique présent lors de la réunion – Pierre Laurent, président du Parti de la gauche européenne – a appuyé la proposition1.

L’Alter-sommet n’est pas un contre-modèle aux processus du Forum social. Ceux-ci resteront intacts et bien visibles comme espaces de dialogue et de plates-formes d’expression et d’expérimentation d’une culture pluraliste de la gauche solidaire. De ce point de vue, le « Forum Florence 10 + 10 » était une rencontre très importante. Cependant, il y a trois éléments politiques par lesquels les ambitions politiques de l’Alter-sommet remplacent le caractère spontané du Forum social et marquent une nouvelle étape du mouvement.

1) Les forces soutenant l’Alter-sommet conviennent que toute lutte défensive uniquement conçue comme lutte de résistance n’est pas suffisante pour contrecarrer avec succès l’offensive de la classe dirigeante. La substitution du mot « Alter-sommet » à la notion de « contre-sommet » traduit bien cette nouvelle ambition. Cela traduit le fait que l’hégémonie néolibérale – qui a conduit à une crise avec un nationalisme croissant à travers l’Europe – doit être confrontée à la notion d’hégémonie à gauche. On doit aussi considérer comme remarquable que les mouvements sociaux mettent pour la première fois en débat la question des rapports de force.

2) Il faut pour cela une nouvelle relation des acteurs politiques solidaires des défis des mouvements. Dans la Charte de Porto Alegre, où le Forum social mondial est défini comme un « espace pluriel et diversifié, non confessionnel, non gouvernemental et non partisan », l’intégration des acteurs politiques – indépendamment du rôle qu’ils occupent au sein des luttes sociales – a été rejeté plus ou moins explicitement : « Ni les représentations de partis, ni les organisations militaires ne doivent participer au Forum. Les chefs de gouvernement et les parlementaires qui assument les engagements de la présente Charte peuvent être invités à participer à titre personnel » (Charte du FSM de Porto Alegre, avril 2001). Dans la déclaration communiquée à la rencontre de Florence, le comité de coordination de l’AS, a formulé différemment la relation entre les acteurs sociaux et politiques : « L’Alter sommet est dirigé par les mouvements sociaux, mais nous acceptons aussi les forces politiques qui soutiennent nos revendications. Les personnalités qui soutiennent notre appel sont les bienvenues. Nous demandons à toutes les organisations et les politiciens de lutter avec nous s’ils partagent l’esprit et l’analyse fondamentale résumée dans notre «Appel».2 Ainsi, une étape nécessaire pour dépasser la coupure entre les acteurs concernés a été accomplie, ce qui – tout en reconnaissant à la fois l’autonomie et les différences – peut amener à développer une lutte prometteuse pour une alternative de gauche en Europe.

3) L’Alter-sommet se considère comme critique, mais pro-européen. Dans l’appel, on peut lire : « Il est impossible de gagner une bataille européenne dans un cadre purement national » … « Nous voulons améliorer le modèle social européen et défendre les peuples, et non les banques, les grandes entreprises et leurs principaux actionnaires. Cela demande d’autres politiques, ce qui suppose de revoir aussi les institutions et les Traités : pas dans le sens d’un durcissement du néo-libéralisme punitif, mais au contraire pour reconquérir la démocratie. » (Appel pour un sommet alternatif, Bruxelles, mars 2012).

Stratégiquement, cela signifie fixer des limites claires aux positions nationalistes sans masquer les dangers d’une direction autoritaire et centraliste des procédures d’intégration.

Au moins sur ces trois points, nous pouvons voir l’Alter-sommet comme une tentative de renouveler le discours des mouvements sociaux. L’accueil généralement positif de la proposition montre que ce développement répond aux attentes de nombreux groupes et individus, de même que la création de structures de préparation nationales, et surtout la volonté des syndicats et des mouvements sociaux grecs de tout mettre en œuvre pour accueillir l’événement à Athènes.

Lors de la présentation officielle de l’Alter-sommet dans le cadre du Forum social « Florence 10 +10 », dans les déclarations des représentants des syndicats d’Europe de l’Ouest, de l’Est du Sud, du vice secrétaire général adjoint de la CES, Patrick Itschert, des intervenants du réseau nouvellement créé des économistes progressistes et d’autres importants réseaux européens – dont transform – cette volonté s’est très clairement exprimée.

On a largement convenu qu’il ne faut pas présenter l’Alter-sommet comme une sorte de « Comité central » des mouvements sociaux. Sa « valeur ajoutée » en ce qui concerne les capacités de mobilisation sociale dans les différents pays réside dans le fait de leur donner une dimension européenne. Lors de l’Alter-sommet lui-même, un ensemble de revendications politiques importantes et bien visibles concernant l’Europe – dans le sens des priorités politiques – sera porté par des représentants européens des mouvements et organisations importants.

Définir ces priorités sera la tâche essentielle et la plus difficile de la préparation de l’Alter-sommet. Toutefois, à elle seule, la tentative de trouver une formulation stratégique commune des priorités traduit déjà une nouvelle qualité du discours au sein des mouvements sociaux et politiques.

Liens

www.altersummit.eu

www.firenze1010.eu

www.jointsocialconference.eu

www.forumsocialmundial.org.br

1 Des intervenants de trois familles de partis « progressistes », les Verts, les sociaux-démocrates et gauchistes ont été invités dans la mesure où ils étaient en accord avec l’Alter-sommet. Des messages vidéo ont été projetés par le député européen des Verts et du PS qui ont exprimé des positions ambivalentes concernant l’Alter-sommet.

2 Voir le flyer du comité d’organisation de l’AS, Florence, novembre 2012.